Merieme Chadid (11 octobre, 1969- )

Merieme Chadid est explorateure, professeure à l’Université de Nice, et astronome au Centre National des Astronomes en France. Chadid est la première femme astronome à diriger une expédition au cœur de l’Antarctique et un programme scientifique qui compte une vingtaine  d’hommes scientifiques. De ce fait, elle est devenue la première femme astronome à fouler le sol de l’Antarctique. En plantant le drapeau marocain au pôle Sud, mais aussi en vulgarisant ses travaux scientifiques entre autres auprès de la jeunesse marocaine, Chadid est considérée comme une fierté nationale.

Merieme Chadid est née et a grandi au sein d’une famille modeste à Casablanca.  Son père était forgeron, et sa mère restait au foyer pour s’occuper de ses sept enfants. Chadid conçoit son projet de devenir astronome à l’âge de douze ans, quand Mustapha, son frère, lui offre un livre sur les lois de la gravitation de Kepler. Malgré l’incompréhension des siens, aussi bien à l’école qu’au sein de sa famille, elle poursuit sa vocation, une étape à la fois.

En effet, si tout le long de sa jeunesse, Chadid poursuit sa passion pour le ciel, ses astres et ses étoiles en se documentant autant que possible sur le sujet, elle franchit la première étape vers son but en 1992, avec l’obtention d’une maîtrise en physique à la faculté de Casablanca.  Mais la réussite de Chadid est suivie d’une décision difficile : quitter les siens pour poursuivre dans une université française la spécialisation appropriée pour ses objectifs, ou renoncer à faire de sa passion une profession.  Et cette décision s’avère d’autant plus difficile pour une jeune femme dont les parents attendent avant tout d’elle de fonder un foyer dans l’immédiat.  Quoi qu’il en soit, Chadid quitte le Maroc pour compléter un DEA en astrophysique, plus précisément en Imagerie en Sciences de l’Univers, à l’Université de Nice, en France.

Derechef, Merieme Chadid affronte des difficultés. Sa première année en terre étrangère est loin d’être une partie de plaisir.   Bien au contraire, elle souffre d’autant de maux que la solitude, l’isolement, le changement de pays, les exigences d’adaptation à un système éducatif nouveau, être femme dans un domaine à prépondérance masculine et être marocaine dans un ancien empire colonial. Mais grâce à sa persévérance, Chadid surmonte ces difficultés.  Ce faisant, elle réussit son DEA d’astrophysicienne en 1993.

Merieme Chadid postule alors à l’Observatoire de Haute Provence, pour y travailler, y préparer sa thèse de doctorat et être en contact permanent avec les étoiles, les télescopes et les astronomes de tous pays du monde qui viennent en mission d’observation.  Il faut dire que ce lieu est tellement reculé qu’aucun étudiant n’y avait séjourné auparavant.  D’ailleurs, sans tarder, Chadid reçoit un refus catégorique du directeur : étant donné son emplacement, l’Observatoire peut convenir à la rigueur aux reclus et aux ermites, mais certainement pas à une étudiante.  C’est se méprendre sur la détermination de Chadid : celle-ci, inébranlable, réitère tout bonnement sa demande, jusqu’à l’obtention de la réponse escomptée. Ainsi, Chadid vit quasiment en réclusion pendant trois ans, le temps de rédiger sa thèse, et d’aimer encore plus le ciel, ses astres et ses étoiles, à force de les observer dans un environnement pur, c’est-à-dire un espace qui ne souffre d’aucune pollution lumineuse. En 1996, Chadid obtient un Doctorat en Astronomie et Astrophysique, à l’Université Paul Sabatier de Toulouse. Le journal quotidien «Le Provençal» publie alors un article intitulé «Une thèse sous les coupoles,» sur le travail de thèse de Chadid : celle-ci détecte pour la première fois des ondes de choc hypersoniques dans des étoiles variables pulsantes, explique l’origine physique de ces pulsations, et contribue à la connaissance des mystères de l’univers.

Immédiatement après le doctorat, Chadid est recrutée comme ingénieure de recherche au Centre national de recherche scientifique de Montpellier. Sans que ses débuts de carrière soient forcément difficiles, Chadid est néanmoins consciente qu’elle travaille dans un domaine quasiment masculin, de plus hautement compétitif.  Autrement dit, dès ses débuts de carrière, Chadid a su fournir les efforts qu’il faillait pour faire valoir ses projets scientifiques, pour piloter des programmes scientifiques internationaux et diriger des équipes d’hommes scientifiques.  Ainsi, de 1998 à 2001, grâce à ses compétences, mais aussi à sa persévérance, Chadid part dans le désert le plus aride du monde, soit le désert d’Atacama au Chili, pour y installer «le Very Large Telescope,» le plus grand télescope au monde.  Derechef, Chadid retombe dans une vie de réclusion : le village le plus proche se trouve à huit heures de piste rocailleuse.  Mais quand on a une passion, on ne s’ennuie pas, même dans les terres les plus hostiles de la planète.  À l’aide de ses télescopes, Chadid s’amuse à aimer le ciel, ses astres, ses étoiles.

En 2002, malgré sa nationalité marocaine, Merieme Chadid intègre la fonction publique en France comme astronome à l’Observatoire de la Côte d’Azur et à l’Union Internationale des Astronomes.  Cette évolution professionnelle transforme sa passion en un vrai métier.  Le rêve d’enfance de Chadid devient donc réalité.

C’est à partir de 2006 que Merieme Chadid réalise son exploit professionnel : l’Institut polaire Paul-Émile Victor la désigne comme leader d’une expédition au pôle sud. Chadid est engagée comme chef d’un programme scientifique international, dont le but est d’installer un grand observatoire au pôle sud.  Réunissant vingt chercheurs masculins, le projet a pour mission d’étudier le site, et d’y installer un observatoire. Après une année de préparation intensive, Chadid et son équipe partent pour le pôle sud à bord du brise-glace Astrolabe.  Les conditions météorologiques sont déplorables, et le trajet est affreusement long : le Dôme Charlie, où les télescopes doivent être installés, se trouve au coeur de l’Antarctique, à une distance de 1100 km de la base française Dumont d’Urville, et de 1200 km de la base italienne Terra Nova Bay. Mais le trajet parcouru en vaut la chandelle : comme planifié, Chadid et son équipe installent les télescopes dans le site, malgré les conditions extrêmes de température, d’altitude, de pression et  d’isolement. Consciente d’être la première femme astronome, et  la première personne marocaine, à fouler le sol de l’Antarctique, Merieme Chadid plante le drapeau marocain dans les lieux.  Pour fêter l’événement, elle cuisine un couscous pour ses collègues… avec de la viande de kangourou.

Merieme  Chadid ne vit pas cloîtrée dans la tour d’ivoire des universitaires.  Certes, elle se considère comme une astronome théoricienne.  Et en tant que telle, elle passe une partie de son temps dans son bureau, à théoriser et à modéliser des observations faites sur le terrain ou par  satellites spatiaux. Néanmoins, elle se considère tout autant comme une astronome observatrice. Ce faisant, elle consacre du temps à l’exploration, la découverte, l’aventure et l’expérimentation.  De plus, elle aspire à être une astronome «populaire.»  En effet, comme Chadid souhaite à la fois renforcer le rôle des femmes dans la science, et léguer une passion et un savoir aux générations à venir, elle participe activement à la vulgarisation de l’astronomie par des conférences, des tables rondes et des documentaires télévisés, en France, au Maroc et ailleurs.  Ainsi par exemple, le film documentaire Tarik Annajah (la Voix de la réussite) qu’elle a réalisée sur l’astronomie pour la jeune génération arabe est en cours de diffusion sur Aljazeera Children Channel.  De façon similaire, elle préside un programme international, regroupant Le Young Global Leaders, le Forum économique mondial et l’Union internationale scientifique, dont la mission est de diffuser la science dans les pays du sud et de l’est.  D’ailleurs, après une conférence qu’elle a présentée sur la «multidisciplinarité dans les sciences» au sommet annuel de Forum économique mondial de Davos, elle a été honorée par le titre « Young Global Leader 2008.»

Quand Merieme Chadid revoit ses origines modestes, sa condition de femme dans un domaine d’hommes, sa nationalité dans un monde d’inégalités géopolitiques et ses accomplissements professionnels, elle soutient qu’il y a de l’espoir pour tous ceux et celles qui travaillent pour réaliser leurs rêves.

(For the English version of this text, click on the link: Merieme Chadid)

Sources :
Je remercie Mme Merieme Chadid (chadid@unice.fr) de m’avoir fourni toutes les informations nécessaires pour écrire cet article.

«Hommage du mois : Meryem Chadid,» dernier accès le 13 février, 2010,
http://www.amb-maroc.fr/accueil-actualit%E9/hommage/portrait-meriem%20chadid.htm

«Raedat, Pioneering Women,» Meriem Chadid (documentaires en plusieurs parties,) Aljazeera Channel, dernier accès le 22 février, 2010,
http://www.youtube.com/watch?v=0XfTH6JiNps.

«The Stargazer, Merieme Chadid, Explorer/Astronomer, Morocco,» Venture Magazine (April 2008) : 27.

Rebecca Miller, Science Hero Merieme Chadid, dernier accès le 22 février, 2010,
http://www.myhero.com/myhero/hero.asp?hero=Meryem_Chadid_09

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